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Publié par Parolesdejuges

Par Michel Huyette



  Alors que dans un récent article le lien était fait entre l'existence d'une procédure de révision et la peine de mort (lire ici), vient de se tenir au Palais de justice de Paris, dans les locaux de la cour de cassation, la seconde et avant dernière étape de la procédure en révision du procès de M. Leprince.

  Rappelons qu'en décembre 1997, M. Leprince a été condamné par une cour d'assises à la réclusion criminelle à perpéuité assortie d'une période de sûreté de 22 années, c'est à dire à la peine la plus lourde de notre code pénal. Le crime poursuivi était l'assassinat en 1994 de quatre personnes de sa famille (son frère, sa belle-soeur, et leurs deux enfants âgés de 10 et 6 ans). Les deux familles habitaient à proximité immédiate.

  Aussi surprenant que cela puisse paraître aujourd'hui, il ne faut pas oublier qu'à cette date le droit de faire appel contre les décisions d'assises n'existait pas, puisqu'il n'a été introduit dans notre code pénal que par une loi de juin 2000. Il était impossible, comme aujourd'hui, de demander un second examen complet de l'affaire par une cour d'assises d'appel. 

  Quoi qu'il en soit, la procédure de révision permet depuis très longtemps, en cas d'apparition d'éléments nouveaux postérieurement à la condamnation définitive et permettant de douter sérieusement du bien fondé de celle-ci, d'annuler cette décision et d'organiser un nouveau procès (pour de plus amples explications lire ici).

  S'agissant de M. Leprince, la commission de révision a été saisie et elle a décidé de transmettre le dossier à la cour de révision, qui a tenu audience le 17 mars 2011.

  Dans sa décision (texte intégral ici) du 1er juillet 2010, la commission de révision a d'abord rappelé, notamment, que :

  -  M. Leprince a reconnu en garde à vue et devant le juge d'instruction avoir exercé des violences sur son frère avec un outil de boucher, puis s'est rétracté ensuite et a refusé de participer à la reconstitution,

  -  la femme et la propre fille de M. Leprince, alors âgée de 16 ans, ont déclaré en garde à vue l'avoir vu frapper son frère,

  -  l'instruction n'a permis de recueillir aucune preuve de l'implication de M. Leprince,

  -  la feuille de boucher saisie a été récupérée dans des conditions non fiables par un ami de la famille,

  - contrairement à ce qui est écrit dans la décision de la chambre d'accusation le renvoyant devant la cour d'assises il n'a jamais reconnu des violences contre sa belle-soeur et ses nièces,

  -  il existe des contradictions entre les aveux de M. Leprince et le récit de sa femme et de sa fille.


 S'agissant des éléments nouveaux allégués par M. Leprince, la commission de révision a retenu que :

  -  postérieurement au procès un couteau de boucher a été saisi au domicile de l'épouse de M. Leprince et que sur ce couteau de l'ADM correspond de façon probable à celui des victimes,

  -  au cours d'une nouvelle expertise psychiatrique la femme de M. Leprince a dit "je me demande si je n'ai pas fait quelques chose, j'ai peut-être tué quelqu'un, je l'ai dit à mon avocate",

  - les nouvelles recherches à partir des déclarations de M. Leprince concernant le film qu'il aurait regardé le soir des faits permettent d'envisager qu'il était à son domicile quand le crime a été commis en fonction de la plage horaire retenue par les médecins,

  -  il est apparu que le commandant de la brigade de gendarmerie entretenait avec la femme de M. Leprince et sa famille des rapports incompatibles avec la procédure en cours diligentée par la brigade,

  - un auditeur de justice qui effectuait un stage chez le juge d'instruction chargé du dossier avait connu la femme de M. Leprince quand il était enfant et qu'elle travaillait au domicile de ses parents.


  Au vu de tous ce qui précède la cour de révision a conclu que "l'ensemble de ces éléments constituent des faits nouveaux inconnus de la juridiction au jour du procès, de nature à faire naître, concernant la commission des quatre crimes, un doute sur la culpabilité du condamné établissant la nécessité de nouveaux débats devant une cour d'assises".

  Elle a logiquement décidé de saisir la cour de révision et, ce qui est peu fréquent, a en même temps décidé de suspendre la condamnation prononcée, d'où la remise en liberté de M. Leprince.


  Lors de la récente audience de la cour de révision, l'avocat général de la juridiction (un magistrat du ministère public qui n'est ni avocat ni général...) s'est prononcé en faveur de l'annulation de la condamnation, laissant transparaître la possibilité que l'épouse soit personnellement impliquée dans le quadruple meurtre et en rappelant que les faits ne sont pas prescrits, ce qui autorise une reprise des investigations dans cette nouvelle direction.

  La cour de révision a mis sa décision en délibéré au 6 avril.

 

 

rem : Sur son blog, le journaliste du Monde Franck Johannès a rédigé de nombreux articles sur cette affaire. Vous pouvez les lire en cliquant ici.
   

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